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Date de création : 13.01.2013
Dernière mise à jour : 13.01.2013
3 articles


Tam

Publié le 13/01/2013 à 15:17 par portraitsdumonde Tags : humanitaire orphelinat vietnam kinésithérapie moi travail bonne centerblog belle monde enfants jeux autisme phu my

 

Tâm

10 ans

Ho Chi Minh

Autiste

Tam est une enfant vietnamien que j’ai rencontrée lors de mon stage à Ho Chi Minh dans l’orphelinat Phu My. Elle présente un autisme sévère et il n’y a que très peu de moyens de communication entre elle et nous. Elle s’exprime par petits cris stridents, qui sont souvent irritants pour les autres enfants. Elle marche toute seule, ce qui pose problèmes aux nurses qui souhaiteraient de la tranquillité pour manger leurs Pho et pour pouvoir bavarder en paix.

Comme Tam est turbulente, les nurses avaient pris l’habitude de l’enfermer dans la salle que j’avais choisie comme pièce de travail : la Sensitivity room. C’est une pièce avec un carrelage en mousse de différentes couleurs et avec nombreux jouets, des coussins, des peluches. Tam n’en sort que pour manger ou pour dormir. C’était assez étonnant d’ailleurs de la voir changer de comportement en franchissant la porte. Est parce qu’elle retrouve des repères à cause des longues heures passées dedans ? ou est ce un sentiment de tranquillité, loin des nurses ? Toujours est-il que nous avons dus partager cette pièce de 3 mètres carré pendant 3 mois.

 

 


Tam reste souvent percée en haut du petite étagère en plastique. Elle se balance d’avant en arrière, imprimant le même mouvement au meuble que je crains de voir casser à chaque instant. Parfois, elle descend de son perchoir. Tam en a que faire de mes occupations avec les autres enfants.J’essaie parfois de l’intégrer dans mes jeux, mais elle se moque éperdument de ce que je lui propose. J’ai l’impression qu’elle me regarde – avec son léger strabisme- comme une bête de foire, une attraction étrange qui n’appartient pas à sa planète, un truc qu’elle voit pour la première fois. Tam est toujours dans son monde où rien ne pénétre. Elle s’approche parfois, me touche, repart, rigole, revient, me tire les cheveux, rigole puis cri. Souvent, je fais monter Tam sur mes épaules. Cela doit être mieux que l’étagère car c’est moi qui joue le balancier. Elle s’apaise, ne cri plus. J’ai fait des demi-journées de rééducation pour d’autres enfants avec Tam sur le dos, sans qu’elle ne bronche. Parfois, je me dis que J'aimerais être de la taille d'un virus, pour voir ce qu'il se passe dans sa tête. C'est terrifiant de voir un enfant pouvant rester une heure à regarder un jouet inerte devant elle. Que se passe-t-il? Se demande-t-elle si il va bouger? Essaie-t-elle de tordre les jouets par un pouvoir psychique comme on déforme les cuillères? Se dit-elle qu'il a grossi depuis hier? Ou ne se passe-t-il tout simplement rien?

Je ne sais pas comment met venu l’idée saugrenue de vouloir lui apprendre à manger. Mais, j’ai voulu relever le défi.


Il a fallu que je l’apprivoise. Ce n’est pas chose aisée. Quand Tam a faim, elle prend la main de la première personne de plus 1m50 qui passe dans le secteur, et l’emmène dans la salle où l’on prépare les bols. Qu’il soit 9h00 ou midi, Tam s’en moque, elle n’a pas notion du temps. Moi en revanche, si ! Et si son heure ne correspond pas à la mienne, Tam passe le temps en faisant une colère qui ne se terminera qu’une fois que je me déplacerai pour aller la faire manger. Une fois le bol dans ma main, la petite me guide par l’autre vers l’endroit qu’elle a choisi pour manger. Une fois à destination, elle me tire sur le bras, d’un air de dire « aller aller on se dépêche, j’ai faim moi !!! » ma première victoire a été très modeste. J’ai fini par imposer mon lieu - toujours par terre certes, mais adossé à un mur. Tam m’attendant à un autre endroit, tape du pied par terre finissant toujours par me rejoindre après un temps de latence incertain. Puis Tam ouvre la bouche et attend que je lui enfourne le bol alimentaire dans la bouche. Alors je remplis la cuillère et la mets à hauteur de ses yeux. Lorsqu’elle en a assez d’ouvrir la bouche pour rien, elle me prend la main pour que la cuillère descende. Plus je deviens feignant plus Tam s’agace, jusqu’au moment ou plus impatiente que moi, elle se met à guider la main. De semaines en semaines, nous faisons de progrès ; elle en autonomie, moi en patience. Le weekend l’a fait régresser. Nous passons les 2 premiers jours a retrouver les acquis de la semaine précédente et les autres à de nouvelles acquisitions. Je m’émerveille de petits détails. Un jour nous avons fait une sacrée prouesse. Elle a réussi à prendre la cuillère. Elle l'a remplie, l'a portée à sa bouche. Et lorsqu'elle s'est aperçue de l'acte ignoble qu'elle réalisait. Elle me l'a envoyée en pleine figure (pleine, la cuillère!). Dois je insister? L'heure des repas sera l'un des seuls instants avec le monde extérieur. Ma cousine ergothérapeute, m’a dit de ne rien lâcher, que je suis sur la bonne voie, et que c’est une excellente chose. Au bout de 2 mois elle mange seule par terre. Les nurses ont arrêté de se moquaient de moi. Les repas ne durent plus une heure et demi, mais 20 minutes. Malgré tout elle est un peu gauche de sa main alors parfois elle en met à coté. Qu’importe, Tam mange seul, elle a appris une norme, elle est indépendante. Il m’a encore fallu quelques temps pour la faire manger assise. Finalement, cette expérience avait nourri la pratique d’une homologue vietnamienne qui s’est mise à faire autant avec une autre enfant.

 

 

Comme tout autiste, Tam est très colérique.

Lorsque les caprices sont petits cela est très facile à régler. Mais lorsque c'est plus important, cela se complique. On m'a expliquer qu’il ne fallait pas céder. Facile à dire et non forcément à faire. Passer une demi heure devant une porte de placard pour qu'elle ne l'ouvre pas en lui répétant que non, elle ne l'ouvrira pas, demande un peu de patience. Et parfois, il faut courir vite pour l’empêcher d’aller faire une autre bêtise.

Pour ne pas qu’elle fasse pas, les nurses l’attachent par le pied au lit d’un de ses camarades. Je pense que c’est cette privation de liberté qui doit rendre Tam comme folle, une vraie furie ! Tâm est l'une des enfants que j'entends le plus, le soir lorsque je vais me coucher. Il faut savoir que ma chambre est juste au dessus de son dortoir. Je reconnais ses cris caractéristiques des moments où elle est bien et surtout ses longues colères accompagnées du grognement orageux des nurses.?En revanche, je ne distingue pas si les bruits de claquement sont dus à la projection de sa tête ou de son pied sur le sol, ou encore aux volées infligées par les nurses aux instincts maternelles corrompus. Ces cris sont d'une violence effroyable. J’entends des claquement sourds, puis plus rien. Parfois je me dis qu’elle s’est fracturée le crane. Il faut croire que cette petite boite qui contient un trésor non décryptable est vraiment solide, car entre ce qu’elle s’inflige et les coups qu’elle prend, c’est pas étonnant que ca ne tourne pas vraiment rond à l’intérieur.

 

A coté de cela, Tam promet plein de surprises. Lui faire l’hélicoptère sur mes épaules et avoir en réponse un énorme éclat de rire, est une bien belle récompense. Parfois même, elle venait se blottir contre moi, 2 minutes. Un vrai pseudo câlin qui mérite toutes les concessions. C’est une de mes petites chéries qui me manquent.

Commentaires (1)

CHOUVELLON-NGUYEN le 25/01/2015
BONJOUR,

J'ai été émue de lire votre article de l'orphelinat où j'ai été il y a de nombreuses années! J'aimerai y retourner pour 3 mois en tant que bénévole, pouvez vous me dire quels sont les besoins et si il existe 1 parrainage pour cet orphelinat. Merci aussi de me donner les coordonnées exactes de l'orphelinat et du responsable...


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